Pour un grand absent, Barack Obama pourrait difficilement être plus présent dans l’âpre bataille que se livrent les candidats à l’investiture démocrate pour la présidentielle.
Cité des dizaines de fois lors des débats, mis en vedette (non consentante) dans des spots de campagne, lui s’en tient strictement à son silence malgré ses avertissements, en coulisses, contre le coup de barre à gauche promis par le favori Bernie Sanders.
L’establishment panique ou Présenter Bernie Sanders contre Trump serait un acte de folie: les gros titres des médias américains reflètent le désarroi de certains démocrates modérés, qui revendiquent leur filiation avec Obama.
Ils s’inquiètent de voir ce socialiste autoproclamé affronter en leur nom le président républicain Donald Trump lors de la présidentielle de novembre.
Après ses bons résultats dans les premiers Etats ayant voté, le sénateur indépendant est, à 78 ans, le grand favori des primaires démocrates.
Et l’avalanche de scrutins prévue mardi pour le Super Tuesday pourrait lui offrir une avance pratiquement imparable pour remporter l’investiture du parti.
La plupart des démocrates initiés sont convaincus qu’il n’y a qu’une façon d’arrêter, ou du moins de freiner, Sanders: que Barack et Michelle Obama se rallient derrière un autre candidat… Et de préférence avant le Super Tuesday, avançait mardi un éditorialiste de CNN, Chris Cillizza.
En novembre, Barack Obama avait affirmé devant des donateurs démocrates que la bataille électorale se remporterait au centre.
Les Américains ne pensent pas que nous devons détruire complètement le système et tout recommencer, avait-il déclaré, soulignant que les Etats-Unis n’étaient pas un pays révolutionnaire.
S’il ne citait personne, tous avaient pensé à Bernie Sanders, qui prône une révolution politique.
A l’automne toujours, le site Politico affirmait que l’ex-président comptait s’exprimer publiquement si le sénateur prenait une nette avance dans les primaires, afin de l’empêcher d’être investi.
Comme Obama l’a dit
Barack Obama reste extrêmement populaire au sein du parti démocrate, souligne Kyle Kondik, politologue à l’université de Virginie.
Sa voix résonnerait donc avec force s’il prenait parti. Mais il y a peu de chances qu’on l’entende.
S’il a plusieurs amis en lice, y compris, bien entendu, son propre vice-président Joe Biden, Barack Obama a dit qu’il ne prévoyait pas de soutenir quelqu’un pendant les primaires, a rappelé mercredi sa directrice de communication, Katie Hill.
Car il estime que pour que les démocrates gagnent à l’automne, ce sont les électeurs qui doivent choisir leur candidat.
En 2016, il n’avait ainsi déclaré son soutien à Hillary Clinton qu’une fois qu’elle fut assurée de décrocher l’investiture démocrate.
Mais il s’est impliqué dans des élections à l’étranger, en annonçant son soutien à Emmanuel Macron, en France, et à Justin Trudeau, au Canada, pendant leurs campagnes.
Le rare commentaire de sa directrice de communication venait dénoncer un groupe de soutien à Donald Trump qui a diffusé une publicité ignoble, dans laquelle d’anciens propos de Barack Obama ont été utilisés hors de contexte pour nuire à Joe Biden.
L’ex-président reste en revanche muet sur les nombreux spots de campagne des candidats à l’investiture démocrate qui utilisent ses anciens discours pour laisser entendre qu’ils ont son soutien.
Sanders privé de discours?
Joe Biden, mais aussi le milliardaire Michael Bloomberg, la sénatrice progressiste Elizabeth Warren, l’ex-maire Pete Buttigieg: c’est à qui proclamera la meilleure relation, l’entente la plus ancienne, l’héritage le plus évident…
Et tous le citent à l’envi pour appuyer leurs positions.
Comme Barack Obama l’a dit, nous devons prendre en compte la position des électeurs de ce pays. Or dépenser près de 60.000 milliards de dollars, ce n’est pas ce qu’ils veulent, a ainsi tweeté Amy Klobuchar jeudi pour dénoncer le programme de Bernie Sanders.
A l’exception notable de Bill Clinton, qui avait soutenu son épouse Hillary lors des primaires de 2008 et 2016, de nombreux ex-présidents ont tenté de rester au-dessus de la mêlée politique, explique Kyle Kondik.
Et il n’y a pour l’heure aucune indication que Barack Obama s’apprête à rompre avec la tradition. Il est peut-être, comme de nombreux autres démocrates, sincèrement indécis, poursuit le politologue.
Mais si Bernie Sanders décrochait l’investiture, je me demande vraiment si Obama ferait un discours à la convention démocrate qui officialiserait en juillet la victoire du socialiste.