Le 31 octobre 2008 naissait le bitcoin, la première monnaie virtuelle décentralisée. Dix ans plus tard, la principale cryptomonnaie nourrit un complexe écosystème mais peine toujours à convaincre dans la sphère économique.
Cette ambition est alors nourrie par la faillite de la banque Lehman Brothers, survenue un mois plus tôt, qui a jeté le discrédit sur les monnaies traditionnelles où une petite élite de banquiers s’enrichit beaucoup, établit les règles monétaires et les impose à tout le monde, souligne Pierre Noizat, qui a fondé la première plateforme française d’échange de bitcoins en 2011.
Le 31 octobre 2008 naissait le bitcoin, la première monnaie virtuelle décentralisée. Dix ans plus tard, la principale cryptomonnaie nourrit un complexe écosystème mais peine toujours à convaincre dans la sphère économique.
Dès sa première évocation en 2008, le bitcoin porte une vision politique. Apparu dans un livre blanc écrit par Satoshi Nakamoto, un pseudonyme dont l’identité derrière reste inconnue, l’objectif affiché est d’utiliser un système de registre décentralisé, la blockchain, pour effectuer des paiements en ligne directement d’un tiers à un autre sans passer par une institution financière.
Cette ambition est alors nourrie par la faillite de la banque Lehman Brothers, survenue un mois plus tôt, qui a jeté le discrédit sur les monnaies traditionnelles où une petite élite de banquiers s’enrichit beaucoup, établit les règles monétaires et les impose à tout le monde, souligne Pierre Noizat, qui a fondé la première plateforme française d’échange de bitcoins en 2011.
Après sa création, le bitcoin évolue pendant plusieurs années hors des radars du grand public, n’intéressant guère que les geeks ou les blanchisseurs d’argent sale.
En 2013, le bitcoin qui ne valait quasi-rien au départ dépasse pourtant les 1.000 dollars et commence à attirer l’attention des institutions financières. La Banque centrale européenne évoque un dangereux fonctionnement à la Ponzi, quand le patron de l’époque de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, salue à l’inverse son potentiel.
Une enfance turbulente
Quelques mois plus tard, la cryptodevise doit pourtant affronter sa plus grande crise avec le piratage de la plateforme MtGox, où s’échangeait jusqu’à 80% des bitcoins en circulation. Le cours s’effondre et il faudra attendre plus de trois ans avant qu’il ne revienne à son niveau de fin 2013.
L’année 2017 constitue d’ailleurs un tournant, pour Pierre Noizat, la sulfureuse cryptodevise passant de moins de 1.000 dollars pour un bitcoin à plus de 19.500 dollars mi-décembre, selon des chiffres compilés par Bloomberg.
La capitalisation totale du bitcoin dépasse temporairement les 300 milliards de dollars, selon le site spécialisé Coinmarketcap. Celle de toutes les cryptomonnaies confondues dépasse même les 800 milliards début janvier 2018, avant que la bulle n’éclate et ne ramène progressivement la valeur du bitcoin autour de 6.400 dollars.
Le concept de monnaies virtuelles, qui existait déjà avant, s’est considérablement répandu grâce au bitcoin, a jugé Bob McDowall, analyste en crytpomonnaies, alors que plus de 2.000 autres monnaies virtuelles ont essaimé derrière son succès.
Une réussite telle que le concept a dépassé le simple statut d’avancée technologique pour devenir presque une religion pour certains, s’inquiète M. McDowall.
Anthony Lesoismier est le cofondateur de Swissborg, un fonds d’investissement suisse proposant des portefeuilles d’actifs basés uniquement sur la blockchain. Interrogé par l’AFP sur l’apport de la cryptomonnaie, il a jugé que la vraie révolution se situe au niveau philosophique, en instaurant un nouveau régime de société avec plus de liberté.
Une vision récusée par l’économiste Nouriel Roubini, connu pour ses prises de position anti-cryptomonnaie. Selon lui, leur décentralisation, souvent mise en avant, est un mythe. C’est un système plus centralisé que la Corée du Nord. Les mineurs (de cryptomonnaies) sont centralisés, les échanges sont centralisés et les développeurs sont des dictateurs, a-t-il récemment dénoncé.
L’âge de raison ?
Si l’idée de départ était de faire du bitcoin un moyen d’échange, la majorité des observateurs reconnait qu’il est surtout utilisé comme réserve de valeur ou instrument de spéculation, du fait de sa volatilité.
Il faut 20 ans pour qu’une technologie réseau de ce type prenne sa place complètement, justifie Pierre Noizat, qui mise sur l’avènement du lightning pour démultiplier la vitesse des transactions, alors que le réseau n’est aujourd’hui capable que de traiter cinq à dix opérations par seconde (contre plusieurs milliers pour l’opérateur de cartes Visa).
Ces derniers mois, la cryptosphère a aussi été agitée par la possible création d’un fonds indiciel adossé aux bitcoins, qui doperait les investissements. Un avis très attendu devrait être prochainement rendu par le gendarme boursier américain, la Securities and Exchange Commission.
Le bitcoin, né pour contourner le système financier, va-t-il finalement l’intégrer ? Il faut accepter certaines passerelles de court terme pour générer l’intérêt du grand public, a jugé M. Lesoismier, qui se considère comme un idéaliste, mais aussi un réaliste.