Le contrat d’une jeune salariée toulousaine de 27 ans n’a pas été prolongé car elle a refusé de porter un autre prénom. Selon un avocat spécialiste en droit du travail, l’employeur est en faute.
Remerciée parce qu’elle n’a pas voulu se faire appeler Marie! C’est l’histoire invraisemblable de cette jeune Toulousaine de 27 ans dont le contrat a été rompu durant sa période d’essai…parce qu’elle a refusé de changer de prénom. Son employeur aurait demandé à plusieurs reprises à cette assistance commerciale de se faire appeler Marie plutôt que Marion. Motif? Les clients auraient pu la confondre avec une autre salarié également prénommée Marion. «Il a argumenté que c’étaient des pratiques courantes dans le secteur commercial de travailler sous un pseudonyme», raconte la jeune femme dans Le Parisien-Aujourd’hui en France. Pour justifier son refus, la salariée expliquait que son patronyme, différent de celui de sa collègue, suffisait à les distinguer. «J’ai l’impression que cette histoire de prénom était une excuse pour ne pas me proposer un contrat à la suite de ma formation», poursuit-elle.
Un document de Pôle Emploi, publié par France 3 sur son site Internet, confirme la version des faits. À l’emplacement «motif de non embauche», un responsable de l’entreprise a écrit: «Problème d’identité au sein de la société – deux mêmes prénoms non voulus par la direction». Pourtant, comme la salariée était en période d’essai, l’employeur n’était pas tenu de fournir un motif de rupture du contrat.
«Un employeur n’a pas le pouvoir unilatéral de demander aux salariés de changer de prénom», affirme au Figaro Éric Rocheblave, avocat spécialiste en droit du travail. Pour lui, l’employeur est donc en faute. Le Code du travail, l’article L1121-1 stipule que «nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché». Le prénom fait partie de ses «libertés individuelles». L’employé est donc en droit de refuser de porter un autre prénom que le sien s’il considère que la raison avancée par son patron n’est pas justifiée. Selon l’avocat, la jeune salariée peut porter plainte pour licenciement abusif. «C’est un cas typique de discrimination. L’employeur reproche à son employé de s’appeler Marion», ajoute-t-il. Reste à savoir ce qu’en penseront les juges si la salariée saisit les juges. «Dans ce cas, la défense devra prouver par des témoignagnes de clients que le refus de la salariée aurait pu causer des torts à l’entreprise», conclut Éric Rocheblave.
Un cas similaire a été jugé par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 18 septembre 2007. L’employeur d’un salarié d’une maison de retraite prénommé Mohamed lui a demandé de se prénommer Laurent. Deux ans plus tard, il obtient de son patron de pouvoir reprendre l’usage de son prénom. Non sans l’avoir attaqué en dommages et intérêts. Dans un premier temps, le salarié a été débouté par la Cour d’appel qui explique qu’il avait accepté ce changement de prénom lors de son embauche et qu’au moment de la signature du contrat de travail, quatre salariés de l’entreprise se prénommaient aussi Mohamed. Une décision de justice annulée deux ans plus tard par la Cour de Cassation qui reconnaît le cas de discrimination.