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A Cannes, tapis rouge pour le petit frère du Bolchoï

Il n’est pas aussi connu que le Bolchoï, mais le Ballet Stanislavski, qui tente de sortir de l’ombre de son grand frère moscovite, n’en est pas moins fêté comme le gratin de Hollywood cette semaine à un festival de danse à Cannes.

Ballet Stanislavski

Les danseurs du Ballet Stanislavski sur scène dans une représentation de Giselle, le 4 décembre 2019, au Palais des Festivales à Cannes |
AFP / VALERY HACHE

Au Palais des festivals, plus habitué à recevoir les célébrités du cinéma, danseurs et ballerines russes ont investi les loges, se maquillant, ajustant leurs costumes ou s’échauffant la veille d’une représentation unique jeudi, après une petite pause sur la Croisette.

La troupe russe de 120 danseurs, qui crée l’évènement de cette édition 2019 du le Festival de Danse Cannes, est en France pour la première fois depuis 65 ans. Avec un Français à sa tête.

Depuis sa nomination il y a trois ans, l’ancien danseur étoile de l’Opéra de Paris Laurent Hilaire, l’un des plus brillants danseurs français de sa génération, a renouvelé le répertoire de la compagnie russe, la troisième après le Bolchoï et le Mariinski de Saint-Pétersbourg.

Une vraie richesse

Un Français peut-il donner des leçons aux Russes?, se demandait à l’époque, circonspecte, la presse moscovite, dans un pays où rares sont les étrangers qui occupent des postes similaires.

Cette même presse aujourd’hui le loue pour avoir élargi un répertoire jugé en partie inadéquat. L’idée est de redonner à cette compagnie une identité et sa place au milieu du paysage artistique, non seulement de la Russie, mais aussi dans le monde de la danse, affirme Laurent Hilaire, 57 ans.

Le Stanislavski est à 500 mètres à vol d’oiseau du Bolchoï mais nous ne sommes pas en concurrence… on présente au public russe le plus large regard sur les chorégraphes d’aujourd’hui, précise l’artiste qui a introduit une quinzaine de chorégraphes au répertoire, de Jiri Kylian au Suédois Alexander Ekman, dans un pays où le public s’ouvre de plus en plus aux créations non classiques.

C’est une vraie richesse, dit-il, tout en précisant vouloir préserver le répertoire à 70% classique de la troupe et l’emmener en tournée.

C’est d’ailleurs avec un grand classique, Giselle, créé à Paris en 1841, que le Stanislavski revient en France, où la troupe retournera en avril au Théâtre des Champs-Elysées.

Laurent Hilaire est le deuxième Français à diriger une compagnie russe après Marius Petipa, un Marseillais qui a fait toute sa carrière dans la Russie impériale et à qui l’on doit tous les grands classiques, comme le Lac des Cygnes ou Casse-Noisette.

Hilaire a lui-même été nommé étoile par un autre Russe célèbre, Rudolf Noureev, après une représentation du Lac des Cygnes dans la version de Bourmeister… qui n’est autre que le chorégraphe emblématique du Stanislavski.

Dans le grand auditorium, la répétition est interrompue par un mélange de remarques en français, en russe et en anglais. Laurent Hilaire est assisté par une interprète, sous le regard de Brigitte Lefèvre, directrice du festival, qui a présidé pendant 20 ans aux destinées de la danse à l’Opéra.

Touche française

Pour celui qui a été aussi un maître de ballet d’une grande exigence à l’Opéra, la manière de s’adresser aux danseurs d’aujourd’hui a un peu changé, dans un milieu de plus en plus soumis la question du harcèlement moral.

Cette manière rude de parler il y 30 ans, c’est quelque chose de dépassé et contreproductif. Aujourd’hui, les mentalités évoluent très vite; il faut accompagner (les artistes), dit-il. Après, un danseur doit aussi faire son travail. C’est un équilibre entre l’attention et l’exigence.

Son mot russe favori est piatka (talon), car dans l’école française prime le travail de bas de jambe, alors que le style russe est axé sur le haut du corps.

C’est un tel privilège d’être dans ce Palais des festivals, affirme Dina Levin, une danseuse de 24 ans.

La ballerine se félicite de la touche française apportée par Laurent Hilaire. Nous avons maintenant un mélange entre deux styles, le russe et le français. Ça donne quelque chose de beau et de très intéressant.

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