Une poignée de capteurs intégrés à la semelle d’une chaussure permettraient-ils d’améliorer significativement la vie de ceux qui la portent ? Au Ceatec de Tokyo, l’industrie montre comment des capteurs au traitement massif des données, la santé gagnerait à être connectée.
Dans cette semelle transparente, Fujitsu cache un capteur de pression, un accéléromètre et un module capable de mesurer la torsion. Le tout communique avec un petit boîtier lui-même connecté au téléphone de l’utilisateur, qui se chargera de répercuter ces informations vers un serveur distant. Aujourd’hui, il faut une batterie avec recharge sans fil pour alimenter l’ensemble, mais il fonctionnera demain de façon autonome, grâce à un film piézoélectrique qui convertira l’énergie de la marche en électricité.
D’un coût marginal – l’équivalent de quelques dizaines d’euros – ce petit dispositif sait donc mesurer l’activité physique de son porteur avec précision. Couplé au GPS du smartphone, il peut aussi suivre sa position en temps réel, et livrer en fin de journée un état des lieux complets : endroits visités, temps consacré à la marche, vitesse de déplacement, etc.
Mais que faire de ces données ? Au Ceatec de Tokyo, Fujitsu invite les acteurs du secteur de la santé connectée à dépasser la mesure de soi individuelle, domaine déjà bien couvert par les innombrables applications dédiées aux bracelets ou montres connectés du marché. Pour ce faire, l’antienne est déjà bien connue : il faut croiser les données. Dans un premier temps, il propose de les enrichir d’une couche supplémentaire d’informations personnelles liées au porteur, qui pourrait renseigner sa condition physique, ses éventuels soucis de santé ou ses objectifs en termes de bien-être. Nourri des statistiques émanant de la base installée, le service construit sur cette base saurait alors prodiguer des conseils adaptés et personnalisés.
« Think global, act local »
Fujitsu file la logique un cran plus loin, en imaginant que ces données soient aussi associées à des informations publiques, de nature démographique par exemple, situées dans le champ de l’open data, de façon à ce que les traitements informatiques effectués sur la base des remontées individuelles accouchent d’analyses valables au niveau collectif. De quoi mieux comprendre les déplacements des piétons en ville ou mieux cerner les habitudes d’une population en termes d’activité physique.
Rencontré à Tokyo, l’industriel japonais se contente d’avancer des pistes de réflexion mais ne prétend pas fournir lui-même les réponses. Il envoie en revanche régulièrement ses ingénieurs participer à des hackathons dans lesquels des équipes planchent sur les différentes façons possibles d’exploiter les données remontées par les capteurs liés à la mesure de soi.
Vers une médecine du travail connectée ?
D’autres avancent une proposition de valeur plus concrète. Son compatriote Kyocera, par exemple, dessine un scénario pensé pour l’entreprise. Chaque employé porte un petit tracker d’activité capable de garder une trace de toute l’activité physique de la journée. Pour ceux qui sont en surpoids, une application mobile permet de mesurer rapidement le tour de taille en faisant glisser un smartphone à la surface du ventre. Elle délivre instantanément une analyse approximative de la masse graisseuse associée. En parallèle, Kyocera propose d’exploiter une application photo intelligente sachant reconnaître les aliments présents dans l’assiette, pour que chacun puisse suivre sa consommation calorique au quotidien.
L’ensemble servirait le collaborateur, en lui permettant de suivre au quotidien sa forme physique. Il pourrait aussi donner naissance à une médecine du travail « connectée », capable demain d’aménager l’emploi du temps d’une personne en particulier pour lui faire prendre un peu d’exercice. Les médecins auraient aussi la possibilité de surveiller les indicateurs de forme au niveau global, de façon à prodiguer conseils ou actions spécifiques à une population d’employés donnée, affectée par un phénomène commun (sédentarité excessive par exemple).
Quel intérêt pour ces deux acteurs ? Chacun à son niveau, ils ambitionnent de se positionner comme celui qui fournira la technologie sous-tendant les futurs services à venir : serveurs et plateforme de développement pour Fujitsu, capteurs et solutions matérielles pour le spécialiste du composant Kyocera.