SpaceX tentera samedi de lancer dans l’espace deux astronautes de la Nasa, après une tentative arrêtée à la dernière minute mercredi par crainte de la foudre. La mission est cruciale: le premier vol habité partant des Etats-Unis depuis neuf ans, et le premier confié à une société privée.
La Nasa et le patron de SpaceX, Elon Musk, ont confirmé samedi matin que la météo, bien qu’incertaine, ne stopperait pas les préparatifs pour un décollage à 15H22 (19H22 GMT) du centre spatial Kennedy, sur la côte atlantique en Floride, sous les yeux du président Donald Trump.
Nous nous préparons pour le lancement aujourd’hui, a tweeté Jim Bridenstine, patron de la Nasa, en ajoutant que le risque d’annulation en raison du mauvais temps restait de 50%. Un report reste possible jusqu’à la fin du compte à rebours, comme mercredi dernier.
Doug Hurley et Bob Behnken vont donc bientôt recommencer à l’identique ce qu’ils ont fait mercredi: revêtir les combinaisons spatiales blanches et noires qui ressemblent enfin à celles des films de science fiction; les adieux à leurs familles; le convoi jusqu’à la fusée dans une voiture électrique Tesla, publicité offerte par la Nasa à Elon Musk qui a créé la marque; et enfin la longue procédure pour s’installer et préparer la capsule Crew Dragon, au sommet de la fusée qui les propulsera dans l’espace à cinq fois la vitesse du son.
C’est un rêve devenu réalité. Je ne pensais pas que ce jour arriverait vraiment, a dit Elon Musk mercredi dernier.
La mission peut sembler un pas modeste dans l’exploration spatiale: Bob et Doug n’iront ni sur la Lune ni vers Mars, seulement dans la vieille station spatiale, à 400 km de la Terre, où Russes et Américains vont et viennent depuis 1998.
La Nasa, pourtant, y voit une révolution, car SpaceX va redonner aux Etats-Unis un accès à l’espace, low-cost, moins cher que ses programmes précédents. Pour trois milliards accordés depuis 2011, SpaceX a entièrement développé un nouveau taxi spatial et promis à sa cliente six allers-retours vers l’ISS.
Elon Musk a apporté au programme spatial américain la vision et l’inspiration qui nous manquait depuis neuf ans, depuis la fin des navettes spatiales. Il est brillant et capable, a loué le patron de la Nasa, Jim Bridenstine, vendredi.
Ejection possible
La confiance a dû se gagner. Elon Musk ne connaissait rien aux fusées quand il a fondé SpaceX en 2002. Ses trois premiers lancements échouèrent. Une fusée a explosé au sol avec un précieux satellite dans sa coiffe, une autre peu après le lancement avec un ravitaillement pour l’ISS. L’an dernier, la capsule Dragon elle-même a explosé lors d’un test des moteurs au sol. Le programme aurait dû commencer en 2017.
In fine, les responsables de la Nasa ont donné le feu vert pour confier à SpaceX deux de ses astronautes. Ils parlent de ce partenariat dans des termes extrêmement laudateurs: la responsable des vols commerciaux habités a évoqué les miracles accomplis par la collaboration des deux équipes.
Samedi dans la mythique salle d’allumage du centre Kennedy, ce ne sera pas un homme de la Nasa qui donnera le go ultime pour le décollage, mais le directeur de lancement de SpaceX, Michael Taylor, les officiels de l’agence spatiale américaine n’ayant pas de rôle dans le compte à rebours.
Crew Dragon est une capsule comme Apollo, mais version XXIe siècle. Des écrans tactiles ont remplacé boutons et manettes. L’intérieur est dominé par le blanc, l’éclairage plus subtil. Un seul cordon ombilical relie les combinaisons aux sièges pour fournir air frais et communications aux deux hommes.
Contrairement aux navettes, dont une a explosé en 1986 après le décollage (Challenger), Dragon peut s’éjecter en urgence si la fusée a un problème.
Si elle est certifiée sûre après le lancement de samedi, les Américains ne dépendront plus des Russes pour accéder à l’espace: depuis 2011, les Soyouz étaient les seuls taxis spatiaux disponibles. Les acheminements depuis la Floride redeviendront réguliers, avec quatre astronautes à bord.