Pour assurer sa reproduction, la toxoplasmose, parasite très répandu, vampirise les chimpanzés, poussés au danger par leur odorat. Et nous ?
Cela ressemble à un mauvais scénario de film SF et pourtant, c’est bien réel : des parasites peuvent influencer notre cerveau en perturbant nos perceptions ! C’est une chercheuse française, Clémence Poirotte qui en apporte aujourd’hui la preuve à travers une étude publiée lundi 8 février dans Current Biology.
Ecologue, spécialisée en évolution, cette jeune vétérinaire prépare une thèse au Gabon dans un grand centre de primatologie, à Franceville. Elle a saisi cette occasion pour conduire une étude très originale autour des chimpanzés.
Depuis quelques années, des travaux sont parus autour d’une possible influence de la toxoplasmose sur le cerveau humain, ralentissant les temps de réaction ou diminuant la concentration ou encore le sens olfactif. Or, pour se reproduire, ce parasite doit impérativement se trouver à l’intérieur de l’organisme d’un félin. Et l’on a pu observer que des souris infectées par lui, au lieu de fuir les chats et d’en avoir peur, s’en approchaient au contraire dangereusement. Comme l’homme n’a plus de prédateurs naturels, on ne peut pas tester ses réactions vis-à-vis d’eux, j’ai donc eu l’idée de monter une expérience autour des chimpanzés.
Le test de l’urine du léopard
Clémence Poirote a donc observé les réactions d’une trentaine d’animaux, porteurs ou non du virus, lorsqu’ils entraient en contact avec l’urine de grands félins. Ce qui est remarquable, c’est que les chimpanzés porteurs du virus deviennent attirés par l’urine du léopard, leur prédateur, et par aucune autre. Autrement dit, au lieu de prendre leurs jambes à leur cou lorsqu’ils peuvent détecter l’odeur de ce redoutable croqueur de singes, attirés par son fumet, ils s’attardent au risque de périr.
Le virus de la toxoplasmose, banal parasite dont près d’un humain sur deux est porteur, est donc en mesure de téléguider leur comportement et de leurrer leur cerveau ! Ça fait un peu froid dans le dos…
A ce jour, seul le virus de la rage était connu pour affecter le comportement, poussant les animaux infectés à mordre pour propager l’épidémie. Pas les humains certes, mais les individus atteints ont un comportement pour le moins étrange. Ils deviennent notamment hydrophobes, ne supportant plus le contact de l’eau. Mais pour savoir si nous sommes, nous aussi, téléguidés par la toxoplasmose, il faudra attendre de nouvelles études.
Véronique Radier