Stratégie : Une question revient sans cesse : qu’arrivera-t-il une fois la période de mise à jour gratuite vers Windows 10 terminée ? Microsoft commencera-t-il à appliquer des frais d’abonnement ? Après examen des résultats financiers de l’éditeur, je suis convaincu que la réponse est un non catégorique.
Depuis des années, ce conseil résonne dans nos têtes : si une affaire semble trop belle pour être vraie, ça l’est probablement.
Cette ligne directrice est généralement exacte, ce qui explique probablement pourquoi je continue d’entendre des sceptiques convaincus que l’offre de Windows 10 gratuit de Microsoft est un piège. Voici comment l’argument se présente généralement, tel qu’il est exprimé dans cet extrait réel tiré des commentaires à un post récent :
Windows as a service, pour moi, signifie qu’ils finiront par appliquer un abonnement ou quelque chose de similaire, pour pouvoir utiliser effectivement votre ordinateur. [Microsoft] laissera gratuite une fonctionnalité de base, mais si vous voulez faire quelque chose d’avancé, vous devrez payer des frais d’abonnement. Tel est le plan directeur, si MS peut y parvenir.
Windows 10 : Microsoft ne renonce pas à toute recette
Cela peut sembler logique, si vous pensez que Microsoft renonce à une chose (une mise à jour majeure) pour laquelle il pourrait collecter des revenus.
Mais c’est la faille dans ce raisonnement. Les mises à jour Windows n’ont jamais été une source majeure de revenus pour Microsoft, le virage de l’entreprise vers le Cloud rend ce fait encore plus flagrant. J’ai écrit au sujet de ce phénomène l’année dernière dans la transition de Microsoft du logiciel traditionnel vers le Cloud prend de l’ampleur. Voici une mise à jour du graphique de cet article couvrant l’ensemble de l’année fiscale 2015 de Microsoft, qui se terminait un mois avant que l’offre Windows 10 gratuit ne démarre.
Microsoft a dégagé 93,6 milliards de dollars de chiffre d’affaires durant l’année fiscale 2015. Près de la moitié de ce total vient des grandes entreprises payant pour des licences de produits serveur, Microsoft Office et les mises à jour de l’édition Windows Entreprise.
Les autres gros morceaux du revenu proviennent des services Cloud (Office 365, Azure) et des équipements (principalement les tablettes Surface et les téléphones).
Contrairement à ce que vous avez pu entendre, Microsoft ne distribue pas gratuitement Windows 10. Sur la période de six mois se terminant le 31 décembre 2015, les fabricants ont payé plus de 6,2 milliards de dollars à Microsoft pour installer Windows sur les nouveaux PC, ce montant incluant des millions de licences pour de nouveaux PC sous Windows 10.
Dans le même temps, au cours de la dernière année pour laquelle nous disposons de chiffres, les licences Windows vendues dans les circuits de distribution, ce qui comprend les mises à jour et les éditions universitaires, ont constitué huit dixièmes d’1% du chiffre d’affaires annuel de Microsoft. Une goutte d’eau.
Et cela en a été ainsi depuis des années.
Historiquement, les plus susceptibles de monter de version sont enclins à le faire au cours des premiers mois suivant la sortie d’une nouvelle version de Windows. Voilà pourquoi Microsoft a offert d’importants rabais pour les early adopters, et que ces prix ont été en chute libre au fil du temps. Ce graphique montre les prix des mises à jour qui ont été offerts le jour du lancement pour les quatre dernières versions majeures de Windows.
Le prix des mises à jour Windows en baisse depuis des années
Les mises à jour Windows Vista Home Premium Business coutaient 159 et 259 dollars le jour du lancement. Ouch.
Les prix d’introduction pour le successeur de Vista, Windows 7, ont été décrits comme une énorme affaire à respectivement 50 et 100 dollars pour les éditions Home Premium et Pro.
Pour Windows 8 Pro, le prix de lancement de la mise à jour était de 40 dollars. Windows 8.1 était une mise à jour gratuite. Et désormais Windows 10 est gratuit pour un très grand nombre de personnes, probablement équivalent à des centaines de millions.
D’ailleurs, Microsoft n’est pas seul à suivre cette direction. Pour OS X Tiger (2005) et Leopard (2007), Apple faisait payer 129 dollars les mises à jour. La firme a fait les gros titres en 2009 avec Snow Leopard à 29 dollars par Mac. Depuis 2013, avec Mavericks, les mises à jour d’OS X sont gratuites.
Je ne vois personne se plaindre qu’Apple est sur le point de refermer un piège sur ses clients et commencer à exiger d’eux un abonnement.
Le point, c’est que Microsoft ne renonce pas à un niveau de chiffre d’affaires significatif. Pour les particuliers et les petites entreprises, les mises à jour fonctionnelles sont simplement une autre catégorie de mise à jour, livrées gratuitement de la même façon que d’autres mises à jour l’ont été pendant des décennies.
Les entreprises souhaitant des fonctionnalités avancées comme BitLocker Drive Encryption, la possibilité d’associer un ordinateur à un domaine Windows, les capacités de virtualisation d’Hyper-V, paient en moyenne en plus 50 dollars pour une licence Windows Pro, généralement avec un nouveau PC. Mais c’est un paiement unique, pas un abonnement.
Les abonnements réservés à d’autres services Cloud
De l’autre côté de la médaille, Microsoft simplifie ses activités en déplaçant la majeure partie de sa base installée vers une version unique. Avoir moins de versions à supporter signifie des coûts moindres pour l’ingénierie et les tests et, au moins en théorie, une plate-forme globale plus fiable et sécurisée.
Dans le même temps, les grandes entreprises paient des abonnements Windows depuis des années grâce au programme de licence en volume baptisée la Software Assurance. Cette redevance annuelle leur donne accès à un grand nombre de fonctionnalités d’entreprise et droits d’utilisation dont les consommateurs et les petites entreprises n’ont pas besoin et ne paieraient certainement pas.
Je ne suis même pas sûr de savoir comment un abonnement Windows 10 pour les particuliers et les petites entreprises fonctionnerait. Quelles fonctionnalités du système d’exploitation seraient soumises à un paiement ? J’ai posé la question aux personnes convaincues que Microsoft a un plan diabolique, et j’attends toujours une réponse qui ait du sens.
Bien sûr, Microsoft dispose d’un produit en abonnement qui a eu un franc succès. La société n’a cessé de faire migrer les consommateurs et les clients entreprises des licences Office traditionnelles vers Office 365. A 99 dollars par an et plus, c’est un marché extrêmement lucratif.
De multiples services aux entreprises sont vendus par Microsoft sous la forme d’un abonnement. Dynamics CRM, Microsoft Intune, et OneDrive (bien qu’il soit intégré à Office 365 rendant le produit indépendant non indispensable) pour en nommer quelques-uns. Et bien sûr il y a Azure, qui combine abonnement et facturation à l’usage.
Tous ces services sont radicalement différents de Windows. Les apps Office sont conçues pour être installées sur des terminaux multiples. La plupart de ces services de gestion s’exécutent dans un navigateur. Un système d’exploitation comme Windows, d’un autre côté, est conçu pour un terminal unique.
L’autre énorme opportunité pour Microsoft sur le marché grand public est le jeu. Lors du 2e semestre 2015, la firme a réalisé 5,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires sur ce segment, presque autant que les revenus de la vente de Windows aux OEMs.
Les ventes de Xbox étaient en baisse, mais le chiffre d’affaires Xbox Live a augmenté de 21%, et les revenus jeux vidéo ont enregistré une croissance impressionnante de 52% grâce aux ventes de Minecraft et au lancement de Halo 5.
Ces ventes sont beaucoup plus faciles lorsque le périphérique sous-jacent est un système d’exploitation à jour, ce qui est encore une autre raison pour Microsoft d’éviter l’altération de son modèle traditionnel de licence Windows.
Oui, le modèle Cloud first de Microsoft lui offre beaucoup de possibilités de vendre des logiciels sous forme d’abonnement. Mais Windows 10 ne sera pas sur cette liste.