Trump provoque un tollé en voulant fermer les frontières américaines aux musulmans

Donald Trump le 3 décelbre 2015 à Washington Photo SAUL LOEB. AFP

La proposition du milliardaire américain Donald Trump, candidat républicain à la Maison Blanche en 2016, de barrer l’entrée des musulmans aux Etats-Unis a suscité une salve de réactions indignées en Amérique et à travers le monde.

Donald Trump le 3 décelbre 2015 à Washington Photo SAUL LOEB. AFP

«J’ai des amis musulmans, ce sont des gens très bien, mais ils savent qu’il y a un problème, et on ne peut plus le tolérer», avait expliqué Donald Trump, ovationné en meeting en Caroline du Sud, quelques heures après avoir annoncé lundi qu’il souhaitait fermer les frontières des Etats-Unis aux musulmans «jusqu’à ce que nous soyons capables de déterminer et de comprendre ce problème».

Même à l’échelle des déclarations incendiaires du candidat en tête des sondages pour les primaires de son parti, la proposition est extraordinaire, et les réactions politiques à la mesure d’une proposition qui semble directement enfreindre la Constitution américaine et l’interdiction des discriminations religieuses.

Les condamnations politiques ont immédiatement plu aux Etats-Unis, y compris chez les rivaux républicains de Donald Trump, de Marco Rubio à Chris Christie. Jeb Bush, qui avait lui-même après les attentats de Paris proposé d’exclure uniquement les réfugiés syriens musulmans, l’a traité de «déséquilibré».

Mardi matin, Lindsey Graham, un autre républicain, a estimé que le magnat de l’immobilier «renforce l’ennemi et met en danger les personnes qui servent notre pays». «Savez-vous comment rendre à l’Amérique sa grandeur ?», a-t-il questionné, reprenant le slogan de campagne du milliardaire. «Dites à Donald Trump d’aller au diable».

Côté démocrate, la Maison Blanche a immédiatement dénoncé une idée «contraire à nos valeurs». «Donald Trump, vous ne comprenez rien. Cela affaiblit notre sécurité», a réagi Hillary Clinton sur Twitter.

«Donald Trump ressemble plus au leader d’une foule prête au lynchage que d’un grand pays comme le nôtre», s’est pour sa part désolé Nihad Awad, directeur du Comité de relations américano-islamiques (CAIR).

-‘la haine et les amalgames’-

La proposition a également provoqué un tollé chez les dirigeants mondiaux.

Pour Dar al-Iftaa, la plus haute autorité religieuse d’Egypte, il s’agit de «remarques extrémistes et racistes» et «cette vision hostile à l’islam et aux musulmans va attiser les tensions au sein de la société américaine».

Le Premier ministre britannique David Cameron est lui en «désaccord total» avec cette proposition, qu’il juge «tout simplement mauvaise, inutile et de nature à semer la discorde», a déclaré un porte-parole du chef de l’exécutif britannique.

A Genève, le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies s’est aussi dit «préoccupé par la rhétorique utilisée», s’inquiétant pour le programme d’installation aux Etats-Unis de réfugiés syriens.

Pour sa part, le Premier ministre français Manuel Valls a fustigé la proposition de M. Trump, estimant qu’il «entretient la haine et les amalgames». «Notre seul ennemi, c’est l’islamisme radical».

Insensible aux condamnations internationales, Donald Trump était mardi matin sur toutes les télévisions américaines pour défendre son idée, estimant au passage sur CNN que Paris «devrait peut-être» adopter la même stratégie, au vu des «immenses» problèmes que connaît la ville avec sa communauté musulmane.

La veille, il affirmait que de nombreux musulmans sont favorables au jihad violent contre les Américains ou qu’ils préfèrent vivre en vertu de la charia (loi islamique) plutôt que de la Constitution américaine.

«Donald Trump appelle à l’arrêt total et complet de l’entrée des musulmans aux Etats-Unis jusqu’à ce que les élus de notre pays comprennent ce qui se passe», expliquait son communiqué.

«La haine dépasse l’entendement», avait lancé Donald Trump, évoquant le couple de tueurs de San Bernardino (14 morts) et les auteurs des attentats de Paris (130 morts). «Ça ne fait qu’empirer, et on va avoir un autre World Trade Center», prévenait-il.

Il n’en est pas à sa première salve anti-musulmane depuis sa tonitruante entrée en campagne à l’été. Après les attentats de Paris en novembre, Donald Trump a appelé — comme le reste de son parti — au rejet des réfugiés syriens. Il avait aussi approuvé l’idée de forcer les musulmans à se déclarer sur un registre afin d’être surveillés, déclenchant un premier malaise dans son camp.

Sur son évasive proposition de lundi, il a simplement précisé que les soldats américains musulmans basés à l’étranger pourraient revenir. Et que les musulmans déjà ici pourraient rester.

Mais quid des citoyens américains musulmans? Et des touristes? Comment mettre en place une telle interdiction, techniquement et juridiquement?

L’annonce peut aussi se lire comme une réponse à Barack Obama, qui dans un discours à la nation dimanche avait enjoint les Américains à éviter les amalgames entre le groupe Etat islamique et l’islam.

«Nous ne pouvons pas nous en prendre les uns aux autres en laissant ce combat se transformer en combat entre l’Amérique et l’islam», avait asséné Barack Obama.

Lundi, au moment même de son annonce, un nouveau sondage CNN le plaçait en tête dans l’Iowa, qui votera en premier aux primaires, le 1er février 2016.

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