Pour obtenir un visa de travail au Royaume uni, il faudra parler anglais et être qualifié

Un nouveau système d’immigration à points qui sera utilisé au 1er janvier 2021 privilégiera les travailleurs les plus qualifiés. Le gouvernement le dévoile ce mercredi.

Le nouveau système d’immigration à points est porté par la ministre de l’Intérieur Priti Patel (ici à sa sortie du 10 Downing Street, le 13 février dernier). | REUTERS/Tobu Melville

Dans le Royaume-Uni post-Brexit, les conditions imposées aux candidats à l’immigration seront beaucoup plus strictes qu’elles ne l’étaient auparavant. Un nouveau système à points, dévoilé ce mercredi, sera utilisé au 1er janvier 2021, à l’issue de la période de transition qui a débuté après la sortie de l’Union européenne le 31 janvier dernier.

Pour obtenir son visa, le candidat devra présenter des compétences spécifiques, parler anglais et avoir déjà une proposition d’emploi avec un salaire minimum annuel de 25.600 livres (30.820 euros). Le niveau de diplôme requis a été abaissé d’une licence à l’équivalent du baccalauréat, pour permettre « une plus grande flexibilité ».

« Nous répondons aux priorités des citoyens en introduisant un nouveau système à points qui fera baisser le nombre d’immigrés », a expliqué la ministre de l’Intérieur, Priti Patel, saluant dans un communiqué un « moment historique » qui « met fin à la libre circulation ».

« Donner la priorité aux meilleurs talents »

Le communiqué ministériel assure que « les visas ne seront plus accordés qu’à ceux qui auront obtenu suffisamment de points », afin de « donner la priorité aux meilleurs talents », comme les « scientifiques, ingénieurs et universitaires ». Le gouvernement assure que les citoyens européens et non-européens seront traités « de manière égale ».

Le ministère britannique de l’Intérieur affirme se conformer ainsi au « message clair » envoyé par le peuple britannique lors du référendum de 2016 et des élections législatives de décembre dernier. Le contrôle de l’immigration avait été un des principaux sujets lors des campagnes précédant ces deux scrutins.

« Notre économie ne doit plus dépendre d’une main-d’œuvre bon marché en provenance d’Europe, mais se concentrer plutôt sur l’investissement dans la technologie et l’automatisation », déclare la ministre dans le document détaillant les mesures, demandant aux employeurs de « s’adapter ».

Le ministère estime que 70 % de la main-d’œuvre européenne actuelle, peu qualifiée, ne répondrait pas aux nouvelles exigences, « ce qui contribuera à faire baisser le nombre (d’immigrés) dans le futur ».

70 points requis pour être candidat

Le nouveau système exige que chaque travailleur étranger accumule 70 points pour pouvoir être candidat. Il n’octroie aucun point à celui qui gagne le minimum requis de £20,480 par an (24 627 euros) et un maximum de 20 points à celui payé au moins £25,600 (30.767 euros). Vingt autres points sont accordés s’il a des « compétences appropriées » et vingt autres s’il parle l’anglais à un « niveau requis ».

Les quelque 3,2 millions de citoyens de l’UE qui avaient demandé à résider au Royaume-Uni avant l’issue du Brexit ne sont pas concernés. Les ressortissants européens n’auront pas besoin de visas pour un séjour de moins de six mois, de même que ceux d’autres pays ayant des accords avec le Royaume-Uni.

Les visas étudiants seront également basés sur un système de points et ouverts aux « talents du monde entier », à condition d’avoir reçu une proposition d’un établissement britannique, de parler anglais et de pouvoir subvenir à ses besoins.

Une responsable du principal syndicat du secteur public, Christina McAnea, a estimé que ces nouvelles dispositions « vont provoquer un désastre absolu dans le secteur de la santé ». Le NHS (National Health Service) fonctionne grâce à des travailleurs étrangers parfois peu rémunérés.

« Les entreprises et les autorités locales ne réussissent pas à embaucher assez de personnel au sein du Royaume-Uni donc ils doivent se reposer sur des travailleurs venus d’ailleurs », a-t-elle expliqué. « Mais même avec ces travailleurs immigrés, il n’y a pas assez de monde pour répondre à la demande ».

La Fédération de l’alimentation et des boissons s’inquiète, elle aussi, d’une éventuelle pénurie au sein de métiers peu qualifiés comme « les assistants en boulangerie, les employés d’abattoir et tous ceux essentiels à toute une gamme de production de denrées alimentaires de base ».

Quant à la présidente du Syndicat national des agriculteurs, Minette Batters, elle a prédit de « graves conséquences pour le secteur agricole », où l’automatisation « n’est pas encore une option viable ».

Dévastateur pour l’Ecosse

L’opposition politique dénonce également ces mesures. Le Labour (parti travailliste) fait valoir que la dépendance de certains secteurs envers la main-d’œuvre étrangère va contraindre le gouvernement à des exceptions. « C’est un système imposant un seuil salarial qui va avoir besoin de nombre d’exceptions […] et qui va le rendre sans signification », a dénoncé la porte-parole du parti, Diane Abbott.

Les Libéraux démocrates, parti opposé au Brexit, estiment que dix mois ne suffiront pas aux entreprises pour se préparer, risquant de provoquer le chaos et la confusion.

De son côté, la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon a dénoncé des mesures « dévastatrices » pour l’économie de son pays. « Notre démographie (en berne) fait que nous devons continuer d’attirer du monde ici », a-t-elle tweeté, « et ça rend cela tellement plus difficile ».

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