Crise migratoire : l’amertume des dirigeants africains

Des familles de burundais attendent pour se faire enregistrer à leur arrivée au camp de réfugiés de Nyarugusu en Tanzanie en juin 2015. STEPHANIE AGLIETTI / AFP

Deux poids, deux mesures. L’expression revient sous une forme ou une autre dans la bouche des dirigeants africains pour qualifier la réponse européenne à la crise migratoire, alors que s’ouvre, mercredi 11 et jeudi 12 novembre à La Valette, sur l’île de Malte, un sommet Europe-Afrique consacré à cette question.

Des familles de burundais attendent pour se faire enregistrer à leur arrivée au camp de réfugiés de Nyarugusu en Tanzanie en juin 2015. STEPHANIE AGLIETTI / AFP

La guerre en Syrie, qui a jeté sur la route des Balkans conduisant vers l’Union européenne des dizaines de milliers de réfugiés, ainsi que les naufrages à répétition d’embarcations de migrants tentant de traverser la Méditerranée, ont en effet ému les opinions publiques européennes, contraignant leurs gouvernements à formuler une réponse à ces drames. « Cela fait pourtant des années que l’Afrique est confrontée à ce problème sans que personne ne s’émeuve en Europe », lâche un diplomate africain qui rappelle, exemple parmi d’autres, que 200 000 personnes, dont une grande majorité de travailleurs africains, ont fui la guerre au Yémen ces derniers mois pour se réfugier en Afrique de l’Est dans l’indifférence générale. Plus de 80 % des mouvements migratoires africains se font en effet à l’intérieur du continent noir, à cause de la misère ou des guerres. Et des centaines de milliers d’autres réfugiés végètent dans des camps africains de fortune.

« C’est un problème de développement économique »

« La convocation du sommet de Malte montre que les Etats européens ont pris conscience que le traitement des questions migratoires nécessite une coopération entre les deux continents. C’est un problème de développement économique », souligne Ozonnia Ojielo, directeur régional pour la gouvernance et le maintien de la paix en Afrique au sein du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

Il reste que la modicité de la somme mobilisée à ce jour par l’Union européenne – 1,8 milliard d’euros – au travers de son Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique, dont la création sera annoncée à Malte, ne permettra pas de fixer les populations africaines en améliorant leurs conditions de vie. Une bonne partie de cette somme – à comparer aux 3 milliards d’euros accordés à la Turquie pour « gérer » la crise syrienne – risque d’ailleurs d’aller vers des projets sécuritaires (lutte contre les filières illégales de trafics d’êtres humains, renforcement des contrôles aux frontières….) plutôt que vers le développement.

« C’est bien que les Européens se mobilisent si cela porte sur des projets à long terme, sinon cela ne servira à rien. La répétition des naufrages en Méditerranée et les risques de mort ne dissuadent pas les candidats au départ, ce ne sont pas les murs ou les barrières artificielles érigés en Europe qui y parviendront », pronostique un diplomate ouest-africain.

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