Le jeune patron du New York Times sort de l’ombre pour faire face à Trump

Quelques mois seulement après sa prise de fonctions, le jeune patron du New York Times, A.G. Sulzberger, n’a pas hésité à répliquer publiquement aux attaques de Donald Trump, une sortie très inhabituelle qui a réaffirmé le rôle prééminent du quotidien.

Arthur Gregg Sulzberger le patron du New York Times répond publiquement aux attaques de Donald Trump | Todd Heisler-The New York Times/AFP/Archives / Todd HEISLER

Arrière arrière petit-fils d’Adolph Ochs, qui racheta le New York Times en août 1896, Arthur Gregg (A.G.) Sulzberger est le descendant de la famille qui a fait du quotidien le journal de référence aux Etats-Unis et au-delà.

En plus d’un siècle les Ochs-Sulzberger se sont, à quelques rares exceptions, toujours tenus en retrait du débat public, laissant les responsables de la rédaction s’exprimer le cas échéant.

Mais poussé, à son corps défendant, sous les projecteurs par Donald Trump à la faveur d’une série de tweets, le directeur de la publication du Times a immédiatement répliqué dimanche, qualifiant le discours du président de dangereux vis-à-vis des médias.

Pour le patron de presse de 37 ans, qui a rencontré Donald Trump à sa demande le 20 juillet, décrire les médias en général comme sources de fausses nouvelles (Fake News) ou des ennemis du peuple favorise menaces et violences contre les journalistes, en particulier hors des Etats-Unis.

C’est inhabituel, c’est certain, considère Dan Kennedy, professeur de journalisme à l’université Northeastern, non pas au sujet de la rencontre, qui ne fait que prolonger une vieille tradition, mais quant aux déclarations d’A.G. Sulzberger évoquant un entretien jusqu’ici tenu secret.

Mais je pense qu’il a eu raison, dit-il, dans la mesure où le président avait le premier mentionné cette rencontre, la décrivant d’une manière erronnée selon le patron du New York Times.

Image studieuse, calvitie et lunettes sévères, A.G. Sulzberger est souvent présenté comme moins extraverti que son père, auquel il a succédé en janvier.

Diplômé de la prestigieuse université de Brown, passé par plusieurs quotidiens avant de rejoindre le Times, il vit et respire New York Times depuis toujours, décrit Jeffrey Morosoff, professeur à l’université d’Hofstra.

Il est né pour être dans la position qu’il occupe aujourd’hui, dit-il.

Répression massive de journalistes

Homme de dossier et de conviction, le trentenaire incarne une nouvelle phase du titre et sa migration à marche forcée vers le numérique, qu’il a pilotée, avec succès, durant trois ans avant de prendre les rênes du Times.

Sa sortie de dimanche fait-elle franchir un cap supplémentaire au New York Times dans son positionnement face à la présidence Trump, déjà objet d’une couverture très agressive ?

Non, répond Dan Kennedy. Je ne crois pas que cela signale quoi que ce soit.

Je soupçonne qu’aucun directeur de la publication n’a jamais connu ce genre de réthorique surchauffée venant d’un président, ce qui explique le précédent, fait valoir Jeffrey Morosoff.

Face aux attaques de Donald Trump, A.G. Sulzberger n’a pas tant cherché à défendre son journal qu’à parler pour la presse en général, élargissant le débat.

Le New York Times a, en effet, peu à craindre du président qui, malgré ses nombreuses références à ce journal défaillant, continue d’échanger directement avec ses journalistes, un accès offert à très peu de médias.

Un traitement aux antipodes de celui réservé à l’autre cible favorite du président, la chaîne d’information CNN, coupée de Donald Trump ou d’une bonne partie de son administration.

Donald Trump charge inlassablement la presse pour plaire à sa base électorale, en grande partie convaincue que le Times et les médias généralistes sont prêts à tout pour avoir la tête du président.

La complicité de Sulzberger dans la +chasse aux sorcières+ corrompue pour démolir la Maison Blanche de Trump est de très loin le plus grand danger pour notre Nation, a ainsi réagi le journaliste ultra-conservateur de la chaîne Fox Business News, Lou Dobbs. Mais, comme l’a souligné A.G. Sulzberger, le discours du président américain est utilisé par certains régimes pour justifier la répression massive des journalistes.

En tant que directeur de la publication du journal américain le plus suivi, dit Dan Kennedy, Sulzberger, tout comme ses prédécesseurs, s’exprime toujours avec, en tête, la responsabilité qu’il a envers la presse en général.

Non seulement il a eu raison, mais j’espère que d’autres éditeurs et journalistes vont se joindre à lui, dit Jeffrey Morosoff.

Il est important, poursuit-il, que des journalistes de tous horizons s’unissent pour montrer au président que son discours dangereux peut mettre en danger la vie de reporters.

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